À l’heure des crises immobilières, du redécoupage du territoire par la pensée métropolitaine, nombreux sont-ceux poussés à subir, inventer ou pratiquer des urbanités mobiles et provisoires. De Moscou à Calais, bulldozers et uniformes éradiquent kiosques et jungles, villes sauvages ou des sauvages, poursuivant une guerre silencieuse qui, depuis le XIXe, a pourtant lieu. Peut-être est-il aujourd’hui nécessaire de réinscrire ces formes architecturales et urbaines dans l'aventure de la modernité dont aussi on les expulse. Depuis 2012, le groupe Echelle Inconnue, emmené par l’artiste et architecte Stany Cambot, tente de dresser les cartes (à moins qu’il ne s’agisse des légendes) de ces urbanités clandestines en Normandie et à Moscou. Une double injonction est aujourd'hui faite aux villes et aux individus : les premières doivent devenir métropoles et les seconds mobiles. Ainsi, au programme de métropolisation du monde, répond une mobilité par lui souhaitée. Une mobilité de cadre métropolitain avec ses oripeaux (téléphones, ordinateurs, etc.) se déplaçant de "cité état" en "cité état" en avion ou train à grande vitesse. Les agents de la fabrique de la ville raccrochent alors le train, architectes en têtes. On se pique désormais de mobile, de léger, de « logement une personne » ou de design de bidonville dans l'espoir qu'un marché émerge. Rien de subversif, mais l’aboutissement d'un programme économique et urbain qui se dessine dès le milieu du XIXe siècle dont le nouveau masque s'appelle métropole.

Cependant et sans eux, depuis le nouveau millénaire, des camions, des caravanes, des containers aussi, abris ou logement de la renaissance d'un prolétariat nomade disparu en France dans les années 20. Des cabanes reconstituant, aux abords des métropoles rêvées, les bidonvilles que l'on croyait disparus. La fabrique même de la métropole génère ainsi une toute autre mobilité. On le voit ici comme à Moscou avec ces brigades d'ouvriers venant de l'autre bout du pays ou du continent que l'on trouve en hôtel low cost, en camping, en caravane, container ou camion au pied du chantier. En lisière métropolitaine, ces mobilités de constructeurs croisent les espaces d'une autre mobilité, celle de ceux que le programme urbain expulse que l'on retrouve en camping, camion, campement, containers ou celle de ceux qui fuient la métropole l'entendant comme la construction d'un espace de contrôle (travellers, certains voyageurs, habitants de yourtes ou de cabane, garagniki, etc...)

Architecture ou urbanisme international et clandestin, ces formes urbaines constituent une réponse probable aux changements urbains impliqués par l’application du consensus de Washington. Application brutale à la Russie des années 90, plus lente à l’espace ouest-européen.

Suivre le projet Makhnovtchina Eastern pour en savoir plus.

INFORMATIONS PRATIQUES :

La conférence a lieu le 4 décembre 2017 à 18h au CEFR (Centres d'Etudes Franco-Russe) de Moscou

Adresse:

Bibliothèque d'État de littérature étrangère

1, rue Nikoloïamskaïa

Entrée libre