Fille d'Echelle Inconnue, la société Les Films Déplanifiés poursuit et développe les projets filmiques du groupe tout en accompagnant des réalisateurs qui partagent nos préoccupations.
L'outil manquant d'Echelle Inconnue
La question animait le groupe depuis déjà longtemps ; après la réalisation du moyen-métrage Blouma, et après avoir pris la mesure de ce que représentait en termes de temps et de coût ce genre de film, nous nous sommes demandés comment inventer un mode de production hybride entre nos travaux au long cours et la réalisation de films plus développés (Voir Journal à titre provisoire n° 8 d'Echelle Inconnue :
Cinéma mobile d'intervention).
Ainsi, Les Films Déplanifiés ne se substituent pas à Echelle Inconnue mais s'inscrit dans la continuité de son travail de recherche et création autour des formes urbaines alternatives et de la réalisation de courts-métrages qui l'accompagne.
L'objectif des Films Déplanifiés est de poursuivre ce travail en lui offrant le temps et les moyens pour en développer une écriture purement cinématographique et synthétique.
L'exemple de Flamanville : Le campement des lucioles
Ce film, fable documentaire sur et avec les travailleurs nomades du nucléaire, pourrait constituer la raison d'être de la société de production Les Films Déplanifiés : ce documentaire est l'aboutissement d'un projet adisciplinaire qu'Echelle Inconnue ne pouvait hisser à la hauteur d'un film.
Entre 2018 et 2019, le projet « Makhnovtchina » nous a conduit à Flamanville, dans le Cotentin, où nous avons rencontré les travailleurs mobiles du nucléaire. Nous y avons entamé un travail d'expérimentation participative autour de l'histoire de l'habitat ouvrier précaire et mobile, outil illégitime, mais nécessaire à l'édification de la ville planifiée.
Les travaux de théorie urbaine menés par Echelle Inconnue à Flamanville ont donc donné naissance à un projet de film.
Le campement des lucioles s'inscrit dans de nouveaux modes de production : il s'agit de construire un projet commun avec les habitants de cette urbanité particulière dans un processus long où le temps se partage entre périodes de résidences et périodes de restitution auprès des premiers concernés : les travailleurs mobiles du nucléaire également personnages du film.
Au commencement, un premier film est réalisé à partir d'images d'archives pour introduire les questions liées à l'habitat des ouvriers en lien avec les projets infrastructurels de Flamanville depuis le XIXe siècle – mines, centrale nucléaire, EPR. Ce court film est montré aux ouvriers qui travaillent sur place afin d'explorer avec eux les occurrences du logement mobile dans cette zone et les formes de travail qui ont été ou sont présentes à Flamanville. Cette projection est l'occasion de faire découvrir le travail de Stany Cambot et de son équipe, de rencontrer de nouvelles personnes, de discuter avec elles et donc de mieux comprendre leur situation.
C'est seulement suite à ces nombreux échanges que le film commence à s'écrire ; et toujours en concertation avec les personnages eux-mêmes.
Dans ce cas précis, Echelle Inconnue apporte une connaissance fine du terrain et du sujet et participe à l'élaboration d'un vocabulaire à la fois technique et plastique ; mais cela ne permet pas l'élaboration pleine et entière d'un film. C'est à ce moment-là que la société Les Films Déplanifiés prend le relais : elle se charge de mettre en cinéma le travail sensible et théorique mené par Echelle Inconnue.
L'ouverture
Originellement créée pour développer des projets cinématographiques du groupe Echelle Inconnue, la société Les Films Déplanifiés s'ouvre désormais aux projets d'autres réalisateurs.
Sa ligne éditoriale s'articule autour de deux axes principaux :
– le soutien de films documentaires de création,
– l'accompagnement de projets expérimentaux, hybrides et/ou numériques.
Produire un cinéma artistique et engagé
Nous faisons le choix de produire des films qui abordent des problématiques souvent peu traitées à l'écran : nous valorisons des projets qui interrogent la ville et le territoire à l'échelle internationale, notamment à travers une dialectique Est-Ouest.
Car nous sommes intéressés par l'Est. Non comme une destination mais comme un espace où se joue une partie du destin de l'Ouest et, plus largement, d'un destin commun hypothétique. C'est parce que nous pensons que ce qui s'y passe a une incidence sur nos espaces pensés (ou représentés) comme clos : migration des Rroms de l'ex-glacis soviétique, travail détaché des ressortissants roumains, ukrainiens, russes, moldaves ou biélorusses, importation des conflits et de leurs habitus (conflit géorgien, balkanique et ukrainien), ou encore importation de modèles économiques et urbains expérimentés depuis les années 1990.
C'est pourquoi nous développons, entre autres, une collection de films qui interrogent les espaces post-soviétiques et mettent en lumière leurs « invisibles ».
En résumé, nous avons la volonté de soutenir un cinéma socialement et politiquement engagé.
Nous souhaitons également mettre en valeur une écriture cinématographique forte, portée par un regard d'auteur. Ce qui se traduit par la production de films qui, à travers la narration de destins individuels, dévoilent des bouleversements collectifs.
Aujourd'hui, Les Films Déplanifiés produit et accompagne six films et quatre réalisateurs.
EN PRODUCTION :
1.
L'Apocalypse a déjà eu lieu, de Stany Cambot : conte documentaire sur les cités de garages habitées de l'ex-URSS
EN DÉVELOPPEMENT :
1.
Le Campement des lucioles, de Stany Cambot : fable documentaire sur et avec les travailleurs nomades du nucléaire qui questionne une évolution du logement ouvrier en France
2.
Donbass, front intime, de Philippe Brault : Documentaire photographique qui se penche sur la guerre du Donbass, en Ukraine, à travers le regard d'un artiste-photographe et de son fixeur
3.
La guerre n'est que la lune de la paix, de Vadim : Documentaire expérimental sur la fragilité de la paix à travers l'expérience personnelle d'un artiste
EN ÉCRITURE :
1.
Vagontchiki, de Stany Cambot : Documentaire de création sur les campements ouvriers russes et les « Vagontchiki » qui construisent aujourd'hui le Grand Moscou
2.
L'anti-tuto de Jean-Charles, d'Alexandre Desliens : Tuto poétique sur la construction maison d'une éolienne
1. (cf Journal à titre provisoire n° 8 d'Echelle Inconnue : Cinéma mobile d'intervention)